dimanche 26 juillet 2009

UN RECORD ASSEZ PARTICULIER

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L'été s'est bien installé, les touristes se bousculent dans les petites rues le mardi soir pour le marché nocturne. Dans la journée les heures chaudes (et elles le sont parfois vraiment) sont consacrées à la sieste ou aux baignades, on ne voit pas grand monde.
Il y a beaucoup de clients passionnés et passionnants, chacun trouverait normal de trouver dans la librairie un interlocuteur à la hauteur de sa propre érudition. Dans l'ensemble on arrive à leur donner la réplique, les savoirs de la libraire et de son commis de mari étant assez complémentaires.
Les clients aiment bien, quand ils sont en groupe, faire étalage auprès de leurs amis de leurs précédentes lectures. C'est pratique, nous avons ainsi un résumé de nombre de livres qu'il ne me viendrait pas à l'idée d'essayer. Il y en a déjà tant et tant que je voudrais lire dès que je vois leur couverture et leur argumentaire ! Mais il paraît que la première règle d'un patron de bistrot c'est qu'il ne doit pas boire son fonds. Un libraire court-il le même risque ?
A propos de performance littéraire j'ai entendu un passant dire ce matin devant la vitrine : « Millénium ? Ah j'ai fait les trois tomes en deux jours, quatre mille pages quand même ! »...
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lundi 29 juin 2009

POLITIQUE ET VELO CATHARE

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Un mois déjà, il est temps de se réveiller… L’été est enfin là, les cigales aussi, bien plus nombreuses dans notre petite forêt cette année que l’année dernière, où une seule représentante de l’espèce s’époumonait dans son arbre.
La campagne électorale est terminée, la libraire n’a pas été élue suppléante car son chef n’a pas eu assez de voix pour se maintenir au second tour, c’était quand même le meilleur on en était tous d’accord entre copains autour des tables le soir. Le reste est un immense sac d’embrouilles en tous genres, les accusations volent bas et les positions réelles ne coïncident pas toujours avec les idées affichées. C’est la politique, disent les cyniques en haussant les épaules. Je préfère rester naïf, et croire que certains font de la politique, à quelque niveau que ce soit, par ambition d’améliorer les choses autour d’eux…
A la librairie l’ameublement est terminé, une fois remplis les derniers rayonnages plus moyen de caser un livre. Ce qui est bien dommage, il y a tant de textes qui mériteraient d’être là, en attente de leur lecteur.
Un homme entre, il demande « Bel-Ami ». Nous l’avons, je le lui tends, il n’a pas l’air étonné de ce petit miracle littéraire. Combien de petites librairies ont-elles en rayon permanent « Bel-Ami » ?
J’ai déjà tenu une librairie, il y a si longtemps que c’était dans une autre vie, mais je retrouve les mêmes personnages : le péremptoire qui exige le livre « Mon cousin boit du rouge » alors qu’il s’agit de « Ma cousine voit rouge », les timides qui demandent la permission d’entrer, celles et ceux qui préfèrent parler de ce qu’ils ont déjà lu que de s’intéresser à ce qui reste à lire, etc… Et les grandes lectrices qui parlent avec passion de leurs dernières découvertes, et les grandes ados qui ne jurent que par Stéphénie Meyer (pour qui ne le saurait pas c’est l’histoire – en quatre forts volumes - d’une ado amoureuse d’un vampire, best-seller mondial qui aurait sauvé les comptes 2008 du groupe Lagardère via Hachette).
Le cauchemar des fêtes des mères et des pères est derrière nous, mes paquets-cadeaux ont soulevé quelque perplexité chez les esthètes.
Les touristes commencent à arriver, ils sont le plus souvent déjà bien informés sur la région. Ce matin l’un d’entre eux, un hollandais parlant anglais, m’a demandé si j’avais le guide du pèlerinage en vélo de Saint-Jacques de Compostelle à Rome. Je ne savais même pas que cela pût exister, et je trouvais que c’était un peu le chemin à l’envers ? Mais il avait la certitude que cela existait, du moins en hollandais, et il a ajouté que c’était une très bonne approche de la question cathare. Ce qui n’a fait qu’ajouter à ma perplexité…
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mercredi 27 mai 2009

CAMPAGNE

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Non, il ne s’agit pas de celle qui nous entoure, et dont on ne voit pas grand-chose en ce moment… Car la libraire s’est mise en campagne, elle est en effet suppléante d’un des candidats au poste de conseiller général du canton puisqu’ il y a une élection partielle dans 15 jours du fait de l’invalidation de notre élection cantonale de l’année dernière.
Alors pendant ce temps le mari de la libraire est promu au rang de quasi libraire, il faut bien que le petit personnel assure quand le patronat bat la campagne…
Notre clientèle locale se constitue petit à petit, chaque jour de nouvelles têtes curieuses apparaissent. Il y a par ici d’assez nombreux grands lecteurs, plutôt des grandes lectrices d’ailleurs, qui discutent fermement les choix qu’on leur propose, et recommandent non moins fermement de se procurer rapidement les œuvres complètes de leurs auteurs favoris.
Contrairement à toutes les idées reçues le délai de livraison n’a pas l’air de troubler beaucoup celles et ceux qui passent des commandes. Plusieurs raisons nous amènent à avoir en ce moment des délais assez variables : les comptes fournisseurs ne sont pas tous ouverts (et certains d’entre eux sont très compliqués à ouvrir), la Sodis (distributeur du groupe Gallimard) a des problèmes informatiques, les fériés répétitifs amènent des clients mais écartent les transporteurs. Eh bien malgré ces aléas les clients savent attendre avec le sourire.
Sur un autre front la situation est bien mauvaise, c’est celle des paquets-cadeaux… J’espérais que cette catastrophe peu naturelle ne se déclenchait qu’aux alentours de Noël, hélas non, il semble s’agir d’une menace permanente. Je fais difficilement face en attendant divers lots de pochettes prêtes à l’emploi dont j’espère qu’elles me permettront au moins de sauver la face.
Un vrai double bonheur se présente pratiquement chaque jour :
- quand une grande lectrice achète en soupirant d’aise le nouveau titre de son auteur favori,
- quand un très jeune enfant fonce tout droit vers le rayon ad’ hoc où se trouve l’ouvrage de ses rêves, repéré lors d’une précédente visite.
Le livre reste un bel objet de désir.
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lundi 18 mai 2009

COMMENCEMENTS

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Encore beaucoup de livres arrivés cette semaine. Heureusement les dernières étagères avaient été livrées et montées par Gérard dimanche dernier, nous avons donc pu jouer une importante partie de "rayon musical", intéressante manoeuvre qui consiste à déplacer des rangées entières de livres d'un endroit à l'autre de la librairie.
Les client qui passent sont pour la plupart du temps charmants, ils se déclarent ravis de trouver une librairie ouverte ici, et de percevoir un vrai choix littéraire de la part de la libraire. Ils ne s'y retrouvent pas très bien dans le rayon histoire, et ma cheffe me le fait clairement remarquer, je crains de devoir abandonner bientôt mes étranges mélanges... A propos d'histoire il est passé un ancien pompier qui avait "fait" Mai 68 en service commandé, il a acheté un livre qui a la forme et la couleur d'un pavé en se demandant s'il le lancerait à la tête du prochain gendarme rencontré, tant il s'était retenu à l'époque de changer de camp. Et l'on douterait encore de la vertu cathartique des livres et de la littérature ?
Maintenant que les choses se sont à peu près mises en place nous avons pu faire une fête avec une trentaine d'amis qui nous ont bien soutenu dans notre projet, une vraie fête de libraire avec jeux littéraires sur le thème des commencements et vins du pays à flots, les deux coulant de source.
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jeudi 7 mai 2009

DEGUISEMENTS

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Le week-end qui vient, celui du 8 mai avec trois jours de congés pour la plupart des français, sera pour Anduze un week-end festif car on y célèbre le centenaire de la mise en œuvre du fameux Train à Vapeur des Cévennes (TVC) dit plus familièrement le petit train. Lancé en 1909 il finit sa première carrière vers 1950, faute de passagers puis de fret. Mais d’énergiques bonnes volontés le remirent sur ses rails en 1989, dans le scepticisme général. Aujourd’hui il est un des fleurons de la région, il transporte chaque été 150.000 touristes ravis de recevoir des escarbilles dans les yeux et de pouvoir hurler dans les tunnels obscurs.
Pour fêter dignement ce centenaire les commerçants d’Anduze organisent plein de festivités, le but étant de recréer quelque peu dans notre bonne petite ville une atmosphère 1900. Nous serons donc pour la plupart déguisés avec des vêtements de cette époque pendant les trois jours qui viennent. Et des apéritifs seront offerts dans les rues aux passants qui passent.
Je serai déguisé en paysan du Languedoc. Il n’y avait aucune redingote de notaire ou de banquier à ma taille, à l’époque les banquiers étaient maigres… Il n’y avait pas non plus de déguisement de libraire, mais celui-là je le mets désormais presque tous les jours.
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samedi 2 mai 2009

BATAILLE DANS UN ENCRIER ?

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Les livres continuent à rentrer dans la librairie, et les clients aussi, ça va bien ensemble. Toujours aussi gratifiant de s’entendre dire que c’est bien d’avoir une librairie à Anduze…
Mais ces livres qui sortent de leurs cartons il faut les mettre en rayon. Et là aïe aïe aïe, quelques incertitudes quant à la composition desdits rayons.
Prenons, pas du tout au hasard, le rayon « histoire » que je veux développer. Il semblerait, selon ma cheffe, que j’aie une conception assez particulière de ce rayon. Je veux en effet ne pas y mettre que de savantes études sur tel ou tel pan d’histoire, mais y mélanger allègrement tous les genres littéraires ayant trait à l’histoire du monde, de l’humanité, des idées et des expériences personnelles ou collectives. Tout cela par ordre chronologique.
Pour la clarté de la démonstration commençons par le commencement, par la préhistoire. En tout premier le livre fondamental de la sortie de la glaise, « Les innommables » de Claude Klotz. Purement imaginaire, et saisissant. Puis des études de Pascal Picq, et d’Yves Coppens. Avec les livres de Darwin et autour de Darwin. Mais aussi les romans de Jean Auel, ou de Pierre Pelot. De la paléontologie, de l’anthropologie, et de l’imaginaire comme s’il en pleuvait (ça c’était la semaine dernière, le beau temps arrive enfin).
Et on suivrait le temps par grandes périodes, mêlant biographies, études, romans, etc… Vaut-il mieux lire les mémoires de Richelieu, « Les trois mousquetaire », ou la saga de « Fortune de France » de Robert Merle ? Les trois si on a le temps, et quelques autres en plus, ou aucun si cette époque n’intéresse pas, je voudrais donner le choix au lecteur de sa propre approche de l’histoire.
C’est d’ailleurs peut-être là que le problème se trouve : il faudrait peut-être appeler ce rayon d’un autre nom, genre « histoires d’Histoire », ou « La marche du monde », ou « Comment les hommes vivent » ?
Je vous passe les détails mais la bataille est chaude, même si elle n’est pas destinée à enrichir les manuels d’histoire.
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dimanche 26 avril 2009

PLUVIEUX DIMANCHE

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Quand il pleut dans les Cévennes, il pleut vraiment… Un temps à ne pas mettre des lecteurs dehors, ils préfèrent lire ou relire ce qu’ils ont déjà dans leur bibliothèque. Il devait y avoir aujourd’hui à Anduze une journée consacrée au thème « Salé Sucré », elle a été annulée, il faudrait la remplacer par un autre thème, celui du « Mouillé Coulé ». Nous pensions faire une vitrine sur le sujet, ce n’est plus très utile maintenant. De toute façon un chat du voisinage est venu s’installer dans ladite vitrine, il s’y trouve très bien et n’a pas envie qu’on la change.
Nos trois premiers jours de travail ont été très intéressants, et plutôt gratifiants. Nos amis sont passés, mais pas seulement eux, beaucoup de visages curieux ou intéressés se sont succédés, se déclarant heureux qu’une librairie soit désormais à portée de leurs pas. Il y a vraiment par ici beaucoup de femmes et d’hommes qui participent avec enthousiasme à divers ateliers, montent des festivités de toutes sortes, ou parlent avec passion de leurs centres d’intérêt.
L’esthétique de la librairie plait aux visiteurs, et les premiers choix de la libraire semblent leur convenir. Ce serait comme un paysage de l’imaginaire où l’on pourrait identifier ses propres trajets, avant de continuer dans la même direction, ou d’obliquer vers d’autres aventures.
Il y a eu des filles d’une douzaine d’années qui savaient exactement ce qu’elles voulaient, et leurs yeux brillaient quand elles disaient attendre impatiemment la suite de ce qu’elles avaient déjà lu.
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